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Le développement d’Internet en Afrique a accentué la pression sur la liberté d’expression et d’information

L’amélioration du taux de pénétration de la data sur le continent a fortement contribué à la diversification, et parfois à la dégradation, de l’offre d’information. Elle a également libéré la parole de la société civile. Dans un monde de plus en plus de connecté, les gouvernements africains soufflent le chaud et le froid, partagés entre les perspectives économiques de la digitalisation et les risques politiques d’une information de moins en moins contrôlable.

Dans son dernier rapport sur les «Tendances mondiales en matière de liberté  d’expression  et de développement  des médias», l’Unesco déplore le fait que la majorité des États de la planète recourent  de  plus  en  plus  à  des  mesures  visant  à  perturber  l’accès  aux  contenus  médiatiques  en  ligne, malgré les dispositions légales prises par les plus hautes instances pour garantir la liberté d’expression et celle des médias – notamment la résolution adoptée en 2016 par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies qui «condamne sans équivoque les mesures qui visent à empêcher ou à perturber délibérément l’accès à l’information  ou  la  diffusion  d’informations  en  ligne,  en  violation  du  droit  international  des  droits  de l’homme». L’organisation considère d’ailleurs l’Afrique comme l’une des régions du monde où ces mesures de filtrage sont en nette augmentation. Elles se traduisent de diverses manières, en fonction des gouvernements.

Blocage d’Internet et des réseaux sociaux

Dans son rapport intitulé «Dictateurs et restrictions : cinq dimensions des coupures d’Internet en Afrique », la Collaboration sur la politique internationale des TIC en Afrique orientale et australe (CIPESA), l’un des deux centres créés dans le cadre de l’initiative «Catalyser l’accès aux TIC en Afrique» (CATIA) et financée par le Département britannique du développement international (DfID), révèle que pas moins 22 gouvernements africains ont ordonné des coupures du réseau Internet au cours des quatre dernières années.

En 2018, il y a eu 21 cas de pannes partielles ou totales d’Internet, contre 13 en 2017 et 4 en 2016, selon Access Now, un groupe de surveillance indépendant.

Depuis le début de l’année 2019, six pays africains dont l’Algérie, la République Démocratique du Congo (RDC), le Tchad, le Gabon, le Soudan et le Zimbabwe ont déjà connu des coupures d’Internet.

Bien que les gouvernements justifient généralement ces mesures restrictives comme indispensables pour des raisons de sécurité nationale, nécessaires contre la désinformation ou les discours haineux, Access Now, dans son rapport 2018 sur « l’état des interruptions d’Internet à travers le monde », estime qu’il n’en demeure pas moins des entraves à la liberté d’expression et d’information au regard du contexte particulier dans lequel elles surviennent généralement : élections, protestation sociales.

A défaut de bloquer Internet, le blocage de l’accès aux réseaux sociaux est l’autre mesure restrictive qui s’est développée sur le continent. Le Tchad est à ce jour le pays africain qui détient le record du nombre de jours de blocage de l’accès aux réseaux sociaux. La restriction, levée le 13 juillet 2019, a duré plus d’un an.

Égypte, Ethiopie : censure de sites internet

Plusieurs gouvernements se sont aussi dotés d’instruments numériques qui leur donnent un contrôle sur les plateformes d’informations et même les contenus. En 2017, Amnesty International avait dénoncé le blocage d’au moins 63 sites Internet en Égypte. Najia Bounaim, directrice des campagnes Afrique du Nord de l’organisation de défense des droits de l’homme, affirmait que «cette répression visant les médias numériques illustre une nouvelle fois la mise en œuvre des anciennes méthodes de la police d’État. Même lors des jours les plus sombres de l’ère répressive de Moubarak, les autorités n’avaient pas coupé l’accès à tous les sites d’information indépendants. Avec ces mesures, les autorités égyptiennes semblent cibler les rares espaces de libre expression qui subsistent dans le pays. Cela montre à quel point elles sont déterminées à empêcher les Égyptiens de prendre connaissance de reportages, d’analyses et d’opinions indépendants sur leur pays».

Selon Paradigm Initiative, depuis mai 2017, le gouvernement égyptien a autorisé le blocage d’au moins 496 sites Web de médias, de blogs, d’organisations de défense des droits de l’homme.

En 2016, l’Éthiopie avait également appliqué le blocage de certains sites d’informations. Amnesty International et l’Open Observatory of Network Interference (OONI) révèlent dans leur rapport commun intitulé « Ethiopia Offline » que le gouvernement a utilisé la technologie DPI (inspection approfondie des paquets) pour filtrer l’accès aux sites Internet, lors des manifestations lancées par les membres de l’ethnie Oromo qui redoutaient que le plan directeur du gouvernement ne se traduise par la confiscation de terres.

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