A la Une Actualités E-Learning Le Burkina Numérique

E-learning/ e-formation au BURKINA FASO: lessons learned! (Deuxième partie)

Nous vous proposons la deuxième partie de notre entretien avec les trois (03) experts sur l’e-education au Burkina Faso:

TIC Magazine BF : Vous avez introduit dans la précédente partie de l´interview le terme d’ingénierie pédagogique ?

Dr. des. Compaoré : Je pense que oui. Il n’est pas exagéré de dire que nous assistons à un changement de paradigme. En apprenant l’ingénierie pédagogique, nous sommes en train de changer le rôle et la place de l’enseignant(e) ainsi que de la cognition, de la responsabilité active et de l’environnement des apprenant(e)s comme individus et groupes d’individus. L’éducation se décentralise. Elle devient aussi une industrie de conception et d’élaboration de cours d’apprentissage numérique. Une industrie telle que nous n’en avons jamais vue dans les siècles passés.

Et pour situer cette ingénierie dans la recherche, il convient de rappeler qu’elle appartient avant tout aux sciences humaines, du fait qu’elle tire son essence fondamentalement des sciences cognitives et son nom le proclame d’ailleurs assez. Mais si l’ingénierie pédagogique peut se résigner à faire son purgatoire auprès des sciences sociales c’est qu’elle ne désespère pas de se réveiller parmi les sciences naturelles à l’heure du jugement dernier. En d’autres termes, cela donne à l’ingénierie pédagogique son caractère distinctif : elle est un humble symbole non stérile d’interdisciplinarité appliquée, une approche d’ailleurs de plus en plus prisée parmi les autres domaines de la connaissance. En fin, elle oscille entre théories, applications, observations et évaluations empiriques. 

TIC Magazine BF : Des cursus de formation universitaire d’ingénieur(e)s pédagogiques deviennent par conséquent incontournables au BURKINA FASO ?

Dr. des. Compaoré : Absolument. Sans occulter en passant l’accès à l’internet en général ; un secteur qui connait par contre un boom sans précédant dans nos grandes villes contrairement aux zones périphériques. Il est opportun de recourir également dans un tel contexte à des dispositifs d’apprentissage dit mixte ou hybride, le blended learning, alternant sessions de formation en ligne et sessions en présentiel.

De plus, la présence physique et sociale d’un(e) enseignant(e) comme aide demeure une composante clée dans la conception des dispositifs et scenarios aussi bien de e-learning, d’apprentissage hors ligne (offline learning) que d’apprentissage mixte (blended learning).

En ce sens, je continue cependant à penser qu’il revient aux enseignant(e)s, précisément aux futur(e)s ingénieur(e)s pédagogiques, de pratiquer tout à la fois ce que l’on appelle une éducation aux médias. Comme il y’a du tout sur internet, on y trouve également tout ; tendance croissante. C.-à-d. donc qu’une éducation aux médias devrait amener les apprenant(e)s (élèves, étudiant(e)s ou professionnel(le)s) à s’interroger sur les modalités de réception des contenus des différents médias numériques, à développer un esprit critique sur les idées, valeurs véhiculées. En somme, à s’interroger sur la nature même de leurs relations avec l’outil et le contenu numérique.

TIC Magazine BF : La résonnance de l’apprentissage en ligne au prêt des apprenant(e)s  déterminera en fin de compte s’il sera accepté par son public cible. Dr Ouédraogo, sentez-vous un engouement réel de la part des apprenant(e)s (jeunes ou d’un certain âge) et des enseignant(e)s pour OPEN Education ?

Dr Ouédraogo : Il faut dire que la problématique de l’enseignement en AFRIQUE et au BURKINA FASO de façon particulière est l’accès à la documentation et à la documentation de qualité. Il n’est pas rare de voir un(e) apprenant(e) qui même avec ses moyens financiers n’arrive pas à se procurer la documentation nécessaire pour son apprentissage. C’est en cela que l’apprentissage en ligne donne une opportunité à ceux qui ont besoin d’une éducation de qualité.

En prenant le cas de OPEN Education l’engouement dépasse même nos prévisions. Par exemple le document le plus populaire a été téléchargé à plus de 57 000 fois. Ce qui nous a surpris les plus c’est que les téléchargements se font le plus dans les régions les plus reculées. Non seulement ces régions reculées sont caractérisées par la difficulté d’accès à internet mais aussi par le cout assez élevé de l’accès à la connexion. Nonobstant toutes ses difficultés, il faut dire que 75% des téléchargements sur notre site viennent des provinces et des départements éloignés de la capitale. Cela se justifie en partie par le faite que le besoin en documentation est criard dans ces régions et c’est là nous devons concentrer le maximum de nos efforts.

La documentation numérique disponible sur le site de OPEN est aussi bien développée pour les élèves qu’en direction des enseignant(e)s qui, par ce biais, seront à mesure d’améliorer leur niveau et leur rendement pour le bien-être des élèves qu’ils enseignent. Due au manque criard d’enseignant(e)s, il n’est pas rare de voir dans les provinces des enseignant(e)s dispenser certains cours alors qu’ils n’ont pas eu la formation nécessaire pour le faire. De ce fait le site de OPEN leur offre une source inestimable de documents de qualité qui permettra à ces enseignant(e)s d’avoir le matériel éducatif nécessaire pour enseigner un cours de qualité et améliorer de façon significative le niveau de leurs élèves. D’où l’engouement et le feedback très positif que nous recevons de la part des enseignant(e)s.

TIC Magazine BF : M. Dr. des. Compaoré vient de souligner les éléments nécessaires pour un e-learning pleinement profitable au BURKINA FASO. Qu’en pensez-vous ?

Dr Ouédraogo : Je suis parfaitement d’accord avec lui et j’insiste sur la pénétration de l’internet en AFRIQUE qui fait que nos politiques en matière de e-learning doivent être pensées de sortes à prendre d’avantage en compte la vaste majorité de nos populations qui ne sont pas connectées.

Selon le World Internet Stats, la situation d’internet en AFRIQUE est marquée par un important retard de développement, et un accès à un réseau lent. Malgré cette situation difficile, le déploiement du réseau progresse et en 2015; 29 % des africains avaient accès à internet. Le cas spécifique du BURKINA FASO montre que seulement 14% de la population à accès à internet. D’où la nécessité de trouver d’autres canaux d’accès pour le e-learning.

OPEN suggère de ce fait l’intensification des solutions offline qui permettent à l’apprenant(e) d’avoir accès à la documentation numérique sans connexion internet. Pour ce faire OPEN expérimente avec succès la version offline sur support SD carte et clé USB de son site.

N’DO: Oui je pense que pour que le e-learning au BURKINA FASO soit profitable il faut qu’ils aient des professionnel(le)s formés en tant qu’ingénieur(e) pédagogique, ce métier qui consiste à la création, la gestion de ressources numériques et l’implantation de cours sur une plateforme d’apprentissage en ligne LMS (Learning Management System). Cette personne à un rôle cruciale dans un système de formation en ligne et d’intégration des TICE dans la formation en général car elle fait l’interface entre les enseignant(e)s et les apprenant(e)s. Il existe plusieurs variantes de ce métier :

  • le techno pédagogue qui lui est entre l’ingénieur(e) pédagogique et le technicien informatique, il est en général administrateur de la plateforme en ligne.
  • le chef de projet e-learning qui accompagne un établissement scolaire ou une entreprise dans son projet de formation de ligne et gère le projet.
  • le concepteur de ressources e-learning qui conçoit des ressources (vidéos, animations et cours) avec des outils spécifique type storyboard ou captivate.
  • le formateur e-learning, est un expert des formations en ligne. Il a un rôle de conseiller, il guide et encadre une personne ou une équipe dans la mise en place de leur dispositif de formation en ligne.

Fin de la deuxième partie

Biographie des intervenants

Dr. des. Clément Compaoré

Dr. des. Clément Compaoré est germaniste, enseignant en ligne et expert en Ingénierie et Conseil en Formation à Distance. Il a soutenu sa thèse de doctorat en Allemand Langue Etrangère et en Psychologie à l’université Louis-et-Maximilien (LMU) de Munich (ALLEMAGNE), prenant part au programme doctoral intégré au sein du Centre Munichois de Recherche Interdisciplinaire sur les Sciences de l’Apprendre, dénommé Munich Center of the Learning Sciences. Ses recherches dans sa thèse ont porté sur l’évaluation formative de l’impact de l’usage d’animations cognitives pour l’apprentissage collaboratif à distance dans des classes virtuelles: « Evaluation von eLernprozessen. Eine empirische Untersuchung am Beispiel des Einsatzes kognitionsbasierter Grammatikanimationen zum kollaborativen Lernen der deutschen Grammatik in virtuellen Klassen ». Il s’intéresse particulièrement à l’ingénierie de scenarios et modules d’apprentissage en groupe médié par ordinateur, à l’implémentation des TICE ainsi qu’à l’évaluation de leur impact sur la motivation et la performance des apprenant(e)s.

Contact: [email protected]

https://www.linkedin.com/in/cl%C3%A9ment-compaore-45848937/

Dr Bachir Ismaël Ouédraogo 

Etudes doctorales en Economics of renewable energy à l’université de Manchester (ANGLETERRE). Economiste et expert en économie des énergies renouvelables, développement durable, risques et politiques des changements climatiques avec une solide expérience académique en économie et finance des politiques sociales. Dix années d’expérience en matière d’énergie et habitat, optimisation des systèmes de production d’énergies renouvelables et l’impact des changements climatiques sur la consommation future en énergie. Modélisation énergétique, conception et optimisation de systèmes hybrides d’énergies basée sur la valeur actuelle. Simulation de la consommation d’énergie dans les bâtiments avec différentes conditions thermo physiques et climatiques. Sept années d’expertise en e-learning et développement de solutions pour l’incorporation des TIC dans l’éducation formel et non formelle en milieu rural. Rapide dans l’assimilation de nouvelles idées et concepts et à mesure de développer des solutions innovatrices et créatives face aux problèmes rencontrés.

Contact: [email protected]

Boudi N’DO, Msc.

Boudi N’DO a fait des études en informatique en se spécialisant dans la réalisation de sites web et la gestion de projet informatique au cours d’un BTS Informatique de Gestion puis une Licence en Science des Technologies de l’Information et de la Communication. Son intérêt personnel pour l’éducation l’a ensuite conduit à faire un Master Approche Interdisciplinaire de la Recherche et de l’Éducation au Centre de Recherche Interdisciplinaire de Paris. Fort inspiré de cette première immersion dans le domaine de l’éducation il a suivi un second Master spécialisé sur la formation en ligne et les plateformes numériques à l’Ecole Supérieure de Professorat et d’Éducation de Toulouse en FRANCE.

Il est présentement au BURKINA FASO.

Contact: [email protected]

https://www.linkedin.com/in/boudi

ARTICLES SIMILAIRES

1 commentaire

Gnakini 18 avril 2019 at 12 h 24 min

Interview très édifiant. Le contexte des apprentissages a changé et on n’arrête pas le progrès. Le Faso a intérêt à intégrer plus sérieusement les tice dans la formation même des enseignants. Bonne suite à vous.

Répondre

Laisser un Commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que cela vous convient. Accepter En savoir plus

NEWSLETTER

Inscrivez-vous et recevez régulièrement des arletes par mail

Vos informations ne seront pas partagées